Lors de la 77ème édition de la Biennale de Venise, qui s’est tenue du 2 au 12 septembre, nous avons eu l’occasion de discuter avec Pascal Diot, le directeur du Venice Production Brigde. Cet espace dédié au développement et à la production de projets cinématographiques joue un rôle important, puisqu’il permet, au travers des meetings qu’il propose, la création d’un réseau entre les professionnels de l’audiovisuel et les projets présentés.
Le Venice Production Brigde est subdivisé en plusieurs marchés, dont le Final cut, qui se focalise sur des productions venant d’Afrique et du Moyen-Orient, le Venice Gap-Financing Market, qui présente des films de fiction, des documentaires et des projets en réalité virtuelle cherchant le soutien financier des producteurs européens et internationaux, le Book Adaptation Rights Market, qui offre à des maisons d’édition un espace leur permettant de favoriser le développement et la production de projets au travers du secteur audiovisuel, ou encore le VOD Market Day, qui, comme son nom l’indique, donne l’opportunité aux plateformes de VOD de proposer leurs services aux distributeurs internationaux. La pandémie a, inévitablement, eu un impact sur les différents ateliers du marché. Cependant, comme l’explique Pascal Diot, certaines choses positives ont aussi pu s’en dégager.
Pascal Diot by © Birgit Heidsiek
Vous êtes en charge d’un marché éclaté en plusieurs subdivisions, quels sont les changements que vous avez ressentis cette année ?
« Le changement évident est la présence de la pandémie du Covid-19, qui fait que nous avons été obligés de créer un marché hybride, avec certains évènements en présentiels et d’autres en ligne, pour pouvoir répondre aux critères de sécurité sanitaire de plusieurs pays. Cette année, ce sont 993 professionnels qui sont venus sur place à Venise et 290 autres qui ont pris part aux meetings en ligne, au lieu des 2700 visiteurs habituels. Le marché était principalement fréquenté par les Européens. Depuis le confinement, c’est le premier marché qui se déroule en présentiel, ça risque même d’être un des seuls, car les marchés des autres festivals sont prévus uniquement en ligne. Au niveau des projets, cependant, il n’y a pas eu de grand changement. Nous avons reçu et sélectionné autant de projets que lors des éditions précédentes pour le Venice Gap-Financing Market et le Final Cut. Le seul changement qui s’est fait ressentir est au niveau des éditeurs, beaucoup d’entre eux n’ont pas pu venir à cause de la pandémie ».
Pensez-vous que les rendez-vous en ligne aient rendu le marché moins dynamique ?
« Il n’y a que les présentations liées à la réalité virtuelle qui se déroulaient en ligne, le reste se passait en présentiel à Venise. Le marché y était très dynamique. Etant donné qu’il était le premier marché à prendre place depuis le confinement, tous les professionnels avaient hâte de rencontrer à nouveau d’autres professionnels et de pouvoir échanger et partager avec eux. Les rendez-vous ont été d’autant plus efficaces. Les gens étaient heureux d’être ici, ça a très bien fonctionné ».
Pouvez-vous nous partager un fait marquant cette édition 2020 ?
« Le plus marquant était avant tout l’ambiance générale. Nous avons, à cause du Covid-19, pris des mesures sanitaires strictes, avec des prises de température obligatoires pour tous ceux qui rentrent dans l’espace occupé par festival, le port du masque obligatoire, la réservation de tickets pour aller voir les films ou assister aux panels en ligne, … Tout ceci a contribué à rassurer les personnes qui venaient au festival, que ce soit le public ou les professionnels, et à donner une ambiance particulière où il y avait moins de monde ».
Quels sont vos craintes et vos espoirs par rapport à tous ces changements qui ont pris place à cause du Covid-19 ?
« Je n’ai pas de craintes spécifiques, car le bilan est très positif. D’ailleurs, on va sûrement garder certaines choses pour l’année prochaine. Nous nous sommes aperçus qu’avoir la possibilité de réserver en ligne la place qu’on souhaite occuper lors d’une projection était plus pratique et fonctionnait bien. En ce qui concerne nos espoirs, toutes les personnes qui ont dû présenter leurs projets en ligne ne souhaitent qu’une chose : revenir ici. Ils n’aiment pas prendre part à des rendez-vous via Zoom ou Skype, ils préfèrent largement les rendez-vous en personne. Ils ont hâte de revenir à un type de marché beaucoup plus normal, où tout le monde se rencontre ».
Quels sont vos attentes et objectifs concernant le développement du marché de demain ?
« Nous allons continuer ce que nous faisons, dans tous les cas. Le Venice Production Bridge est un marché différent de ceux de Cannes et de Berlin, ce ne sont pas l’achat et la vente qui sont au cœur de notre marché, mais les services que nous pouvons rendre aux producteurs et à la production. Par exemple, nous souhaitions cette année, s’il n’y avait pas eu le Covid, développer un marché dédié à la réalité virtuelle, que je ferai l’année prochaine. Je suis également en train de réfléchir à d’autres pistes pour développer d’autres services pour les producteurs ».
Quel est l’impact de la pandémie sur les films dont le développement ou la production ont été lancés ?
« Certains projets, notamment ceux liés au Gap-Financing Market, ont dû retarder leur tournage. Il se pourrait que, alors que nous atteignons habituellement un taux de 82% de films qui complètent leur financement dans les 6 mois suivant le marché, il y ait un décalage dans le temps. Certains tournages ont été repoussés au printemps prochain, et ces projets seront donc terminés plus tard, peut-être pour le deuxième semestre de 2021. C’est le principal impact du Covid ».